Allonger ou raccourcir la lactation : that's the question.
Références : (1) Van Knegsel ATM et al. Extending lactation length: consequences for cow, calf, and farmer. Journal of Animal Science, 2022, 100, 1–10 https://doi.org/10.1093/jas/skac220 et (2) Sehested J et al. Review: extended lactation in dairy cattle. Animal (2019), 13:S1, pp s65–s74 doi:10.1017/S1751731119000806
Classiquement une période d’attente (PA) de 40 à 60 jours est recommandée en élevage laitierpour permettre l’obtention d’un intervalle entre vêlages (IV) aussi proche que possible de l’objectif de 365 jours. Avec les années cependant, la production laitière moyenne des vaches Holstein s’est intensifiée. Il en est résulté une augmentation de l’IV le plus souvent de manière involontaire compte tenu de l’impact négatif accru des facteurs pathologiques ou zootechniques, directs ou indirects liés à la production laitière. Ainsi, en 2020 aux Pays-Bas, respectivement 35 et 28 % des élevages avaient un intervalle entre vêlages compris entre 390 et 409 jours et entre 410 et 429 jours. Ces observations posent la question de l’intérêt d’un allongement volontaire de la la période d’attente (90 à 200 jours vs 40 à 60 jours) et conséquemment de la période de lactation. Ce choix comprend divers aspects.
Effets sur la production laitière et sa persistance
D’une manière générale, l’allongement de la lactation se traduit chez les pluripares par une diminution de la production laitière moyenne exprimée par jour d’intervalle entre deux vêlages. Chez les primipares, cette production est augmentée. Les différences individuelles observées impliqueraient le recours à des paramètres d’identification (IGF1, AGNE) des vaches potentiellement concernées. Par ailleurs, l’effet peut dépendre du nombre de traites journalières, trois traites par jour assurant une augmentation de 13 % de la production laitière par rapport à deux traites par jour. De même, l’effet sur la production laitière est positivement corrélé aux apports énergétiques de la ration.
Un allongement de la lactation s’accompagne d’une meilleure persistance (chez les primipares plus que chez les pluripares), conséquence possible de l’apparition plus tardive de l’effet négatif de la gestation sur la lactation.
Un allongement de la lactation n’aurait pas d’effet sur la composition protéique ou en matières grasses du lait.
Effets sur le score corporel
Un allongement de la durée de la lactation augmente le risque d’augmentation du score corporel en fin de lactation et durant le tarissement chez les vaches dont la production laitière est plus faible. Cette situation serait un facteur d’aggravation du bilan énergétique négatif après le vêlage. Ce risque peut être circonvenu moyennant une adaptation du régime alimentaire.
Pathologies
L’allongement de la lactation contribue à réduire sur la vie de l’animal le nombre de périodes de transition et par conséquent le risque de pathologies métaboliques ou infectieuses, d’infertilité ou de réformes. La longévité de la vache s’en trouverait augmentée.
Un allongement de la lactation s’accompagne en fin de lactation et surtout chez les pluripares d’une augmentation du taux cellulaire qui n’est pas corrélé à la presence de mammites. Une réduction de la production en fin de lactation serait de nature, la pression intrammaire étant diminuée, à favoriser le “bien-être” de la mamelle et à réduire le risque de nouvelles infections.
Reproduction
L’impact d’un allongement de la durée de lactation sur la fertilité est d’une manière générale positif mais cet effet ne semble pas être systématiquement significatif. On peut y voir une conséquence de l’allongement de la phase de récupération d’une balance énergétique négative et donc d’une meilleure cyclicité et d’une réduction de l’état inflammatoire de l’utérus. Plus concrètement, une étude (Niozas et a. 2019) rapporte qu’une politique d’allongement de la PA à 120 voire 180 jours réduirait de 30 à 35 % le nombre d’inséminations nécessaires par 10.000 kg de lait produits. Elle réduirait de 75 % le nombre de protocoles Ovsynch utilisés.
Les veaux
Les effets d’un allongement de la lactation sur la croissance et les performances de production et de reproduction du veau n’ont pas encore fait l’objet d’études spécifiques. Il n’est pas exclu de penser que l’obtention d’une gestation en période d’anabolisme plutôt que de catabolisme (c’est-à-dire lors d’une balance énergétique négative) puisse avoir des effets favorables, les performances du nouveau-né étant diminuées lorsque l’état de santé métabolique de la mère n’est pas optimal.
Un allongement de la lactation va se traduire par une réduction du nombre annuel de veaux produits. Il en résulterait une réduction du temps passé à élever les veaux mais également une diminution du nombre de veaux disponibles pour l’engraissement
Conséquences économiques
Diverses modélisations ont l’intérêt économique d’un objectif de 12 mois d’intervalle entre vêlages. Elles se basaient cependant sur des productions laitières moins élevées que celles actuellement observées et sur des périodes de lactation décidées pour des causes involontaires. La situation semble bien avoir changé. Plusieurs études insistent sur l’intérêt économique d’un allongement de la période d’attente (90 à 200 jours vs 50 à 60 jours) celui-ci se traduisant par une production laitière sans doute moindre mais également par une réduction des frais vétérinaires et des coûts alimentaires. Les différences individuelles observées recommanderaient d’adopter une stratégie plus individuelle et d’allonger la période d’attente des vaches dont le potentiel laitier est plus élevé.
Conséquences environnementales
On le sait, la quantité de gaz à effet de serre (GES) produite est inversément proportionnelle au niveau de production laitière. Un allongement de la lactation contribuerait donc à augmenter cette production. A contrario, l’augmentation de la longévité et la réduction du nombre de veaux produits et donc du nombre de génisses élevées et du nombre de veaux utilisés pour la production de viande dimlnuerait la production de GES. Un allongement de la lactation peut également favoriser l’utilisation des fourrages et réduire celle des concentrés, les céréales étant ce faisant davantage utilisées pour l’alimentation humaine.
Que et comment choisir ?
Il semblerait donc bien qu’allonger la période d’attente et par conséquent la durée de la lactation offre de réelles opportunités mais que cette politique doive être réservée aux vaches ou troupeaux ( ?) dont la production est plus élevée ou pour un troupeau donné doive être réservée en priorité aux primipares. Se pose donc le problème des critères de choix à définir tels que le pic de production, la production prévue en 305 jours, la persistance, le score corporel au vêlage … Le recours à du sperme sexé constitueraitégalement une alternatie intéressante pour assurer un nomre adéqut de génisses de remplacement.
Il reste du pain sur la planche…

