La famille des acides gras De Novo, un outil pour le nutritionniste et le vétérinaire
Un outil récent, issu du spectre infrarouge, disponible dans RumiSense.eu
Les acides gras de novo sont devenus un indicateur multifonction : santé, performance et économie. Parce qu’ils reflètent directement l’activité fermentaire du rumen et la capacité de synthèse de la glande mammaire, ils signalent précocement les dérives de pH (SARA) et les carences en fibres efficaces. Sur le plan technico-économique, un niveau élevé de DNFA s’accompagne quasi systématiquement d’une meilleure teneur en matière grasse et en protéine du lait, donc d’un prix de vente supérieur . Enfin, le suivi automatisé des DNFA via les analyseurs FTIR (Infrarouge, Comité du lait) transforme chaque prélèvement de tank en outil de pilotage « low-cost », permettant d’ajuster ration, confort au cornadis et densité de troupeau sans attendre les baisses de production ou les troubles digestifs.
La plateforme RumiSense vous propose cet outil dans les outils de gestion du tank à lait, onglet Acides gras.

Acides gras de novo dans le lait de tank : un baromètre simple pour piloter la nutrition des vaches laitières
1. Pourquoi s’intéresser aux acides gras de novo ?
Les acides gras de novo (DNFA ; C4 – C14) sont synthétisés dans la glande mammaire à partir de l’acétate et du butyrate produits par la fermentation ruminale. Chez la vache laitière haut‑productrice ils représentent normalement 18 – 28 % des acides gras totaux du lait .
Plusieurs études de terrain montrent qu’un niveau élevé de DNFA dans le lait de tank est lié :
- à une meilleure teneur en matière grasse et en protéine (donc un meilleur prix du lait) ;
- à un revenu additionnel estimé à 16 € par 100 vaches et par jour (différence de MG + MP entre fermes “Haute DN” ≥ 24,6 g/100 g AG et “Basse DN” ≤ 23,1 g/100 g AG) .
En bref, suivre les DNFA, c’est suivre directement l’efficacité fermentaire, la santé ruminale et la rentabilité.
2. Comment mesurer les DNFA sur le tank ?
Les analyseurs infrarouges, de paiement au Comité du lait, peuvent prédire les DNFA en temps réel grâce à des modèles PLS robustes (Mis en place par les équipes de Uliege Gembloux, CRA-W et Awé, Consortium FuturoSpectre).
Repère terrain : viser ≥ 24 g DNFA /100 g AG ou ≥ 0,90 g DNFA /100 g de lait pour considérer qu’un troupeau est “bien réglé”.
3. Facteurs de risque identifiés en ferme
| Levier observé | Seuil ou tendance critique | Impact mesuré sur les DNFA |
|---|---|---|
| Densité de logettes | > 110 % (≥ 1,10 vache / logette) | 4,7 × plus de risque d’être “Bas DN” |
| Espace au cornadis | < 46 cm / vache | 10 × plus de risque d’être “Bas DN” |
| Fréquence de distribution | 1 × /j au lieu de 2 × | 5 × plus de risque d’être “Bas DN” |
| Fréquence de “Repoussage” | < 5 passages /j | Tendance à DNFA plus faibles |
| Ether‑extract de la ration | > 4 % MS (3,7 % vs 4,0 %) | DNFA significativement plus bas avec EE élevé (Matière grasse) |
| peNDF (fibres efficaces) | Faible peNDF | DNFA plus faibles ; Haut DN = peNDF plus élevé |
| Sur‑occupation & faible fréquence de repas | Surpopulation, 1 repas /j | Déprime de la synthèse DNFA et des rendements MG/MP |
Lecture rapide : sur un tank avec DNFA < 22.5 g/100 g AG, il faut d’abord vérifier la densité de logettes et l’espace au cornadis, puis la fréquence d’alimentation et l’excès de matières grasses dans la ration.

4. DNFA : un indicateur pratique de pH ruminal
Chez des vaches canulées, la concentration en DNFA dans le lait suit étroitement le pH ruminal :
- r = 0,47 entre DNFA (g/100 g AG) et pH moyen ;
- r = − 0,51 entre DNFA et durée < pH 5,8 (critère SARA).
Ainsi, chaque baisse de 1 g de DNFA /100 g AG prolonge la durée quotidienne sous pH 5,8 d’environ 30 minutes – un signal d’alerte simple pour le praticien et le nutritionniste.
5. Quels outils dans RumiSense ?
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- Mettre en place un suivi hebdomadaire DNFA via les échantillons de tank, diponible dans RumiSense (www.rumisense.eu)
- Déclencher une revision de ration lorsque DNFA < 22 g/100 g AG ou chute de > 1,5 g en une semaine :
- compter les vaches / logette et mesurer l’espace linéaire ;
- vérifier la fréquence réelle de distribution & push‑up ;
- Connaitre la teneur en Matière grasse et peNDF de la ration mélangée.
- Objectif : revenir à > 22.5 g DNFA /100 g AG et stabiliser la fluctuation hebdo < 0,5 g.
6. Conclusion
Les Acide gras De novo, DNFA offrent un thermomètre de rumination intégré dans chaque prélèvement de lait de tank. En combinant cette mesure rapide au conseil nutritionnel, RumiSense peut :
- détecter précocement les dérives de pH,
- hiérarchiser les leviers de correction (logettes, fibres efficaces, graisses),
- chiffrer le gain laitier et économique attendu.
En bref, un simple chiffre devient un outil de pilotage quotidien pour la santé du rumen et la performance du troupeau.
Références clés
- Woolpert et al., 2016. J. Dairy Sci. 99: 8486‑8497
- Woolpert et al., 2017. J. Dairy Sci. 100: 5097‑5106
- Fukumori et al., 2021. JDS Communications 2: 123‑126
(la liste complète est disponible sur demande)
Encart technique : Des acides gras du lait liés à la rumination
Dans la glande mammaire, les acides gras de novo (C4 à C14, voire une partie du C16) sont construits à partir de l’acétate et du butyrate produits par la fermentation ruminale, qui parviennent quasi intacts au tissu mammaire ; le butyrate est d’abord converti en β‑hydroxy‑butyrate, autre substrat carboné majeur. Une fois dans l’épithélium alvéolaire, l’acétate est activé en acétyl‑CoA puis l’enzyme clé acétyl‑CoA‑carboxylase (ACC) forme le malonyl‑CoA, amorce donnant le coup d’envoi au complexe fatty‑acid‑synthase (FASN). Celui‑ci ajoute itérativement des unités C₂ (issus du malonyl‑CoA) jusqu’à C16 ; une thio‑estérase de chaîne courte libère précocement les acides gras à 4–14 carbones, expliquant leur abondance relative dans le lait. L’énergie réductrice (NADPH) provient du cycle des pentoses phosphates et de l’isocitrate‑déshydrogénase. Le processus est stimulé par l’insuline (qui augmente le flux de glucose et l’expression d’ACC/FASN) et freiné par les isomères trans‑10, cis‑12 CLA issus d’une bio‑hydrogénation ruminale anormale : ces isomères abaissent l’expression d’ACC/FASN et activent l’AMP‑kinase, réduisant ainsi la synthèse des DNFA et faisant baisser la fraction C4‑C16 du lait . Chez la vache laitière, la très forte corrélation entre le débit de C4‑C14 dans le lait et la production totale de C4‑C16 (r > 0,9) en fait un excellent proxy de l’activité de novo .
