Les performances de production et de reproduction sont "programmées" durant la gestation.

Référence : Meesters M et al., The importance of developmental programming in the dairy industry, Animal Reproduction Science, (2024). doi:https://doi.org/10.1016/j.anireprosci.2024.107428

La notion de programmation du développement (developmental programming) implique que les caractéristiques maternelles telles l’âge, le numéro de lactation, la nutrition, la production laitière ou le score corporel mais aussi des facteurs environnementaux comme la saison ou le stress thermique qui président durant la gestation à la croissance de l’embryon et du fœtus peuvent également avoir des effets sur le nouveau-né après sa naissance. Ces effets concernent la croissance mais également le métabolisme ou l’immunité, la reproduction, la production laitière ou encore la longévité. Leurs mécanismes sont multiples. Ils impliquent largement le développement et la physiologie placentaire. Ils concernent également des modifications épigénétiques de l’expression des gènes. Par épigénétique, il faut entendre la discipline de la biologie qui étudie la nature des mécanismes modifiant de manière réversible, transmissible et adaptative l’expression des gènes sans en changer la séquence nucléotidique. Ainsi, la nutrition, les pesticides et herbicides mais aussi les interactions sociales ou encore le stress thermique peuvent avoir des effets sur les gènes impliqués dans le développement fœtal.

Cette synthèse se propose de décrire les conséquences possibles de ces facteurs sur le poids à la naissance et donc le développement postnatal, la fertilité, la production laitière et la longévité. Leur caractérisation doit nous inviter à porter une attention plus spécifique aux conditions de la gestation.

Le poids du nouveau-né

Le poids du veau à la naissance reflète la qualité de son développement utérin.

Le poids des veaux issus d’un transfert d’embryons obtenus in vivo ou in vitro est ou non selon les études, supérieur à celui de ceux issus d’une insémination artificielle, conséquence possible d’une gestation plus longue ou du syndrome LOS/AOS (large/abnormal offspring syndrome) résultant d’une altération de l’épigénome de l’embryon. Il en résulte une augmentation du risque de dystocie.

Une diminution des apports alimentaires durant la gestation, imputables à des erreurs du calcul de ration, à un déficit énergétique résultant d’une production laitière élevée ou à une compétition alimentaire entre les animaux en cas de surpopulation, constitue un des principaux facteurs de réduction de la croissance intrautérine et donc du poids à la naissance. Cette diminution peut également altérer la composition en fibres musculaires et en adipocytes du nouveau-né. A l’inverse, des apports excessifs en fin de gestation peuvent également altèrer le développement du nouveau-né.

Le poids de veaux à la naissance tout comme le transfert d’immunité passive est diminué si leurs mères ont été exposées à un stress thermique lors du tarissement. Ces vaches accouchent par ailleurs 2 à 4 jours plus tôt.  La surface de leurs cotylédons est par ailleurs augmentée.

Une diminution (< 22 mois) ou une augmentation (> 25 mois) de l’âge du premier vêlage tout comme l’augmentation de la production laitière chez les pluripares de 3 à 6 lactations ou encore un allongement de la lactation associée à une réduction de la période de tarissement, interfèrent négativement avec le poids du nouveau-né. Cette réduction du poids à la naissance augmente le risque de mortalité néonatale et celui d’un manque de développement ultérieur.

La fertilité

Le délai d’obtention d’une gestation est allongé de 3 à 4 jours chez des génisses issues d’une fécondation in vitro. La fertilité et la fécondité seraient ou pas meilleures chez les génisses nées de primipares comparées à celles de génisses nées de pluripares. La concentration en AMH (AntiMullerian Hormone) des génisses nées de pluripares serait plus élevée. Leur population folliculaire et leur longévité serait ainsi accrue.

La population folliculaire de génisses nées de mères en lactation serait plus élevée que chez celles dont les mères ne sont pas en lactation.

Une restriction alimentaire pendant la gestation contribue à réduire la population folliculaire de la descendance.

Un stress thermique subi en fin de gestation réduit les performances de reproduction de la descendance cet effet serait médié par une réduction de la concentration en AMH.

La distance entre l’anus et le clitoris ou la vulve est considérée comme un marqueur de l’exposition aux androgènes durant la gestation. Elle est inversément proportionnelle à la fertilité. Il est possible que cet effet doive être mise en relation avec l’effet négatif d’une exposition des veaux avant leur naissance aux isoflavones, un sous-groupe de phytooestrogènes connus pour altérer le métabolisme des stéroïdes.

La production laitière

La production laitière de la descendance diminue avec l’augmentation de l’âge du premier vêlage et le niveau de la production laitière durant la gestation.  Semblable observation a été faite si la mère a été gestante en été (vs hiver) ou a subi un stress thermique en fin de gestation.

La présence d’un fœtus mâle a pour effet de réduire la production laitière subséquente.

La longévité

La probabilité qu’une vache produise plus de 100.000 kg durant sa vie productive est significativement plus élevée si (1) elle est née en septembre et si sa mère était une primipare.

La probabilité qu’une génisse atteigne sa première lactation est plus élevée si sa mère n’a pas subi un stress thermique en fin de gestation. Il en est de même si la gestation de sa mère a été obtenue durant les mois d’hiver.